Atelier d’écriture n°1 : Dix mots pour la francophonie ! – TEXTE de Fidel Pastor-Sanz
MADAME LANDRU
Madame Landru, c’est ainsi qu’elle se faisait appeler, était une femme d’une quarantaine d’années. Elle portait, posé bien haut, un chignon massif sur la tête, qu’elle avait dessiné en forme de zigzag. Ce qui lui donnait, d’ailleurs, un air d’hurluberlu. Elle tenait à bout de bras, pour ne pas écraser son élégante coiffure, bien ouvert et par tous les temps, son parapluie rouge sur lequel s’inscrivait en lettres dorées : S.O.S.
Madame Landru souriait tout le temps, à tous les passants, parfois même, elle leur montrait sa langue volumineuse qu’elle agitait de haut en bas ou de droite à gauche, tout en louchant, mais ce qu’elle aimait le plus, c’était les suivre dans la rue en les imitant. En effet Madame Landru vénérait l’art de s’amuser et ne manquait pas une occasion pour ambiancer l’espace public.
Parfois, lorsque le soir arrivait, elle s’installait en dessous d’un balcon et chantait à tue-tête des airs d’opérettes qu’elle connaissait par cœur :
– Le tohu-bohu du destin
– Tire-larigot de Puccini
– La Ouf de Chaillot.
Elle ne se lassait pas d’ambiancer les nuits, vers trois heures du matin, et accourait pour accompagner avec une vielle casserole ses amis un peu timbrés qui venaient faire le charivari devant les maisons des bourgeois qui eux, s’enlivraient.
Madame Landru se divertissait comme une folle, elle croquait la vie à pleines dents et la coquine allait la nuit dans les tavernes pour boire du cognac à tire larigot.
C’était rincée, comme une queue de pelle, qu’elle ouvrait et refermait son parapluie en faisant apparaitre son « S.O.S », pour me signaler qu’elle était en détresse et qu’il était temps que j’aille la ramasser.
C’était à ce moment-là uniquement que j’apparaissais.
J’arrête là mes fariboles, car Madame Landru est ma femme et je dois absolument, pour le repos de son âme et sans plus tarder, la faire revenir au foyer.
Fidel Pastor-Sanz, mars 2014.